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Pour une augmentation du nombre des Parcs Naturels Régionaux en Normandie et, éventuellement, leur extension

Mardi 16 Mars 2021

LES DOSSIERS DU MONDE DE DEMAIN - DOSSIER N° 1
présenté par
• Le Mouvement Normand
• L’Office de Documentation et d'Information de Normandie (O.D.I.N.)
• L’Organisation Normande de Défense de l'Environnement (O.N.D.E.)



Préambule :

Le « monde de demain », évoqué dans ses discours par M. le Président de la République, est flou et incertain. Quand aura lieu le retour à une situation sanitaire normale lorsque la pandémie de la Covid 19 sera éradiquée ? Dans combien de mois, voire d’années, les effets de la crise sociale et économique qui en est la conséquence se seront-ils estompés ? Nous ne le savons pas, nous l’espérons dans un temps le plus bref possible. Mais ce que nous savons, c’est que cette crise va perturber les fondamentaux de la société normande et, très prosaïquement, les éléments statistiques sur lesquels s’appuient les politiques menées par l’État, la Région et les autres collectivités locales.
Pour faire bref, reconnaissons qu’il est difficile, faute d’une connaissance des moyens mis à la disposition des dirigeants, de faire des prévisions et d’élaborer des programmations.
C’est donc le moment du rêve, des propositions les plus ambitieuses et des souhaits fervents. Ils n’engagent que nous.
Serons-nous exaucés ? Donnons du temps au temps.
Avec les « dossiers du monde de demain », nous comptons rassembler les options et les opinions de tous ceux qui réfléchissent au devenir de la Normandie. Certes, les associations et organisations du Groupe Mouvement Normand sont et seront les premières à être sollicitées, mais d’autres organisations peuvent et pourront être les bienvenues et participer ainsi à un exercice n’ayant a priori rien à voir avec quelques préoccupations électoralistes. L’idéal serait que tout cela permît l’ouverture de débats. Après tout, c’est de l’avenir de la Normandie dont il s’agit.

PARCS NATURELS RÉGIONAUX DE NORMANDIE

En octobre 2017, on fêtait à Paris le cinquantenaire de la création des Parcs naturels nationaux et régionaux : 51 Parcs étaient rassemblés. La Normandie était présente avec 4 Parcs naturels régionaux (P.N.R.). Ainsi que le faisait remarquer Jean-Pierre Girod, président du P.N.R. des Boucles de la Seine normande, « la Normandie était rassemblée » et il continuait « On souhaite vendre non pas un Parc, mais l’ensemble de la Normandie » (in Paris-Normandie – 14 octobre 2017). Voilà qui situe parfaitement l’enjeu de l’existence des Parcs pour la Région. M. Girod, cette fois dans le Courrier Cauchois (13 octobre 2017), précisait :

  • Ils ont fait la preuve de leur utilité.
  • Ils ont su s’adapter aux changements des limites (que ce soit celles de la Région, des Intercommunalités, des regroupements de cantons).
  • Ils ont apporté une ingéniérie locale.
  • Ils animent les territoires.
  • Ils sont précurseurs du développement durable, en énergie renouvelable, en biodiversité.

« Certes, ajoutait-il, les Parcs manquent de pouvoirs, mais on corrige ce handicap par des démarches volontaristes, contractuelles ; on cherche à fédérer et on évite les redondances. » et encore « L’innovation est notre salut ! ». Par exemple, les 4 Parcs de Normandie ont su s’adapter à la nouvelle donne de la réunification de la Normandie, trouvant de nouvelles cohérences entre eux et recherchant des mutualisations. Autres exemples : l’objectif de réhabilitation des mares, des clos-masures du Pays de Caux, la reconstitution des haies bocagères et la promotion de l’économie de proximité…

À noter que ces déclarations datent de 2017 et qu’aujourd’hui, en 2021, dans le cadre de la crise de la Covid 19, chacun préconise les circuits courts. Les P.N.R. sont donc prémonitoires… ou des précurseurs. De même, leurs exigences en matière de défense de la biodiversité ont servi de modèle…
Dans le même article du Courrier Cauchois (signé Ghislain Annetta), un vice-président du Conseil régional de Normandie, Didier Péralta, renchérissait : « Un Parc régional est un laboratoire vert, un laboratoire de développement durable ».

Cette vision… normande des choses est corroborée dans un article du Figaro (21 octobre 2017), dont le titre est explicite : « A 50 ans, le label Parc naturel régional est toujours aussi convoité », soulignant que la notoriété discrète des P.N.R. par rapport aux Parcs nationaux s’appuie sur la sur la protection du patrimoine et le développement local. « C’est le seul système d’organisation territoriale qui doit montrer l’efficacité des politiques menées pour justifier son maintien », et d’en préciser les objectifs :

  • Maintien de la biodiversité
  • Réintroduction d’espèces
  • Économie du bois
  • Recherche ou redécouverte de matériaux nouveaux à partir d’éléments traditionnels (chaux – chanvre – roseau – lin, etc.)
  • Retour des haies en pays de bocage.

Dans les Parcs, l’homme est un acteur de la biodiversité et, actuellement, il existe 2 500 produits « marque Parc naturel régional », produits de qualité avec des cahiers des charges très lourds.
La notion de P.N.R. est une spécificité française, mais d’autres pays s’y intéressent (Norvège, Maroc, Chine, Pays d’Amérique du Sud) et – nous sommes alors en 2017, rappelons-le - le label Parc est demandé dans 20 projets émanant de collectivités territoriales.

Le Figaro terminait sa longue enquête en soulignant la fragilité financière des P.N.R. dont le budget provient à 50 % de la Région, 10 % de l’État, le reste des autres collectivités : d’où la nécessité pour les dirigeants des Parcs d’être en dialogue permanent avec les élus, mais – c’était la tendance alors - « On ne souhaite pas des Parcs qui n’auraient pas les moyens de défendre leur territoire et leurs ambitions ».
Ce souhait semble avoir été entendu en Normandie (malgré la crise) puisque – d’après Paris-Normandie du 12 mars 2021 – le Président de la Région, Hervé Morin, est venu à la Maison du Parc des Boucles de la Seine normande pour signer une convention entre la Région et les 4 P.N.R. normands sous le leitmotiv « Pour un futur plus vert ». C’est un financement de 8,2 millions d’euros pour la période 2021 – 2023. Les enjeux s’actualisent :

  • Contre le réchauffement climatique
  • Pour la maîtrise de l’artificialisation des sols
  • Pour pérenniser les grandes structures paysagères
  • Pour diffuser les comportements éco-responsables et développer le sentiment d’appartenance aux terroirs de chacun de ces Parcs.

Hervé Morin précisa lors de la signature de la convention :

« Les Parcs régionaux sont des laboratoires, un lieu où on est en capacité d’accompagner les politiques menées par les collectivités, mais aussi un lieu de réflexion et d’expérimentation. »


LES QUATRE PARCS NORMANDS (présentation succincte)

  • Le P.N.R. des Boucles de la Seine normande, créé en 1974
    • 77 communes – 103 000 habitants
    • 89 700 ha – 30 % de forêts – 24 % de zones humides
  • Le P.N.R. Normandie – Maine, créé en 1975
    • 139 communes (dont 91 en Normandie) – 92 000 habitants
    • 275 000 ha – 18 % de forêts – 4 000 km de cours d’eau
  • Le P.N.R. des Marais du Cotentin et du Bessin, crée en 1991
    • 119 communes – 74 000 habitants
    • 148 000 ha, dont 30 000 ha de zones humides
  • Le P.N.R. du Perche, créé en 1998
    • 92 communes, dont 49 dans l’Orne – 77 000 habitants
    • 194 000 ha – 26 % de forêts – 1 650 km de cours d’eau
Au total, les P.NR. représentent 17 % de la superficie de la Normandie
C’est dans les déclarations des dirigeants de ces P.N.R. que l’on discerne les spécificités et les vocations de chacun d’eux.

1. - Pour le P.N.R. des Boucles de la Seine normande
Outre les propos du Président Girod sur lesquelles nous ne reviendrons pas, nous citerons quelques passages de l’article de Liberté-Dimanche du 13 avril 2014, intitulé « Les nouveaux horizons du Parc naturel régional » :
  • - Ses missions : protéger les paysages
    1. protéger le patrimoine culturel et naturel
    2. développer le tourisme rural (Route des fruits, route des chaumières, route des panoramas)
  • - Son budget (en 2014) 3,2 millions d’euros
    1. dont Région : 820 millions d’euros
    2. département de la Seine-Maritime : 500 millions d’euros
    3. département de l’Eure : 200 millions d’euros
    4. Agence de l’eau Seine-Normandie : 460 millions d’euros
    5. Communes : 70 000 euros
    6. État : 200 000 euros
    • Ce budget n’a pas évolué en structure en 2019 (nous n’avons pas les chiffres de 2020 et, sans doute, ne sont-ils pas probants avec la crise).
En 2015, Laurence Dervaux, nouvelle directrice du P.N.R., déclarait en arrivant : « La Normandie est un territoire sur lequel je retrouve des éléments que je connaissais à Scarpe-Escaut. Il y a une qualité de paysages et une qualité de vie indéniable » (Paris-Normandie, 26 septembre 2015)
Le président Girod, pour 2016, fixait les objectifs :
  • Obtenir le label international RAMSAR pour la zone humide du Marais-Vernier
  • Ouvrir une résidence d’architecture au Trait
  • Réaliser un ouvrage de vulgarisation sur le passé industriel, de Duclair à Rives-en-Seine
(in Courrier Cauchois, 29 janvier 2016)


Pauline Brossart, dans Paris-Normandie du 1er décembre 2016, s’extasiait sur la publication d’un 4e Guide « Au fil des patrimoines », pour les communes de Saint-Wandrille-Rançon et Caudebec-en-Caux et donnait la parole à J.-P. Girod :

« C’est un projet expérimental qui vise à recenser, étudier, faire connaître et protéger le patrimoine local. C’est une volonté de révéler et de partager des trésors cachés. L’objectif de cet inventaire croisé est de décloisonner les regards, croisant patrimoine bâti, éléments paysagers associés et la mémoire orale »…

Parfait résumé de tout l’intérêt culturel enraciné du système des Parcs naturels régionaux !
Cette expérience éditoriale de 2016 s’est confirmée en 2021 par la publication encore plus réussie d’un guide « Au fil des patrimoines » consacré à la Boucle de Brotonne (Arelaune-en-Seine, Notre-Dame-de-Bliquetuit, Vatteville-la-Rue).

 
2.- Pour le Parc Normandie – Maine
D’après une interview de sa directrice, Geneviève Santini, parue dans Ouest-France (27 juin 2018), l’objectif du moment – outre, bien entendu, les missions que l’on retrouve dans tous les P.N.R. –, c’est d’obtenir le label Géoparc mondial de l’UNESCO. Qu’est-ce qu’un géoparc ? C’est un espace géographique unifié qui engage une démarche sur trois piliers (préservation du patrimoine – éducation – tourisme durable )… « Un géoparc possède des sites géologiques remarquables et il se trouve que nous en avons. Nous voudrions que notre territoire soit reconnu et mieux valoriser nos petites montagnes et tous nos sites géologiques ».
Il y a actuellement 140 géoparcs UNESCO dans le monde.

Comment obtenir ce label ?

« Il faut lancer des produits touristiques particuliers sur le géotourisme qui est en plein essor aujourd’hui et avoir des politiques volontaristes de préservation de l’environnement. On le fait depuis des années, mais on n’avait pas conscience qu’on pouvait mieux valoriser le Parc »…

Et Madame Santini d’énumérer des lieux emblématiques : la Fosse Arthour, les Alpes mancelles, Bagnoles-de-l’Orne, la Carrière des Vaux à Saint-Hilaire-la-Girard (première réserve naturelle régionale géologique)… Et elle poursuit :

« Nous avons aussi des projets ambitieux d’aménagement de nos géosites. Il pourrait par exemple y avoir un promontoire sur une falaise où les familles pourraient monter et se rendre compte que nous avons une richesse incroyable en Normandie »

L’auteur de cet article-interview, Alexis Perché, de conclure : les bénéfices recherchés de cette politique volontariste sont à trouver dans le tourisme rural et la notoriété.

3.- Pour le P.N.R. des Marais du Cotentin et du Bessin
Le Parc a révisé ses statuts en janvier 2017 et en 2018 (cf. Ouest-France du 21 novembre 2018, article de Sylvie Roussine) et ses dirigeants ont défini à la fois ses vocations et ses atouts.
D’abord la vocation touristique, notamment à partir du phénomène connu de « la blanchie », lorsqu’en hiver, les marais deviennent une mer intérieure. Le président du Parc, Jean Morin, l’affirme : « C’est un atout touristique qu’il faut développer, surtout en dehors de la période estivale ». Faire connaître les activités et les animations autour de l’hiver – mais pas seulement – est un objectif qui se concrétise par le chiffre de 10 000 touristes par an pour les balades en bateaux sur la Douve. Le Parc en a profité pour remettre en place l’escale à l’Auberge de l’Ouve aux Moitiers-en-Bauptois.
Seconde orientation du Parc : développer la dimension pédagogique. Les scolaires sont un public privilégié et des « classes-parcs » ont accueilli plus de 7 000 élèves. De plus, 25 000 scolaires sont venus à la Maison du Parc pour découvrir le marais, sa faune, sa flore, son climat, son bâti de pierre et de terre.
Enfin la directrice du Parc s’est assignée la mission d’aider la population à « s’approprier le territoire des marais ». 30 000 habitants en zone humide sont directement concernés et le Parc conseille une cinquantaine d’agriculteurs qui exploitent 10 000 ha de zones humides via un contrat MAE (mesures agri-environnementales).
D’autre part, le Parc participe à la réussite de 45 chantiers de réhabilitation d’habitats en terre en y consacrant des sommes importantes (350 000 euros en 2017)
Enfin le Parc est un territoire d’expérimentation, notamment de la gestion de l’eau et des cours d’eau (Aure – Vire – Douve – Taute) en liaison avec 17 associations gestionnaires. « Une réflexion est en cours avec les élus du Bassin versant de la Baie des Veys dans le cadre de la GEMAPI (Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations). »

Une exposition, en octobre 2019, s’est déroulée à la Maison du Parc, à Carentan, sur le thème « Vivre dans le Parc des Marais… en 2050 ». Comme le déclara alors le président Jean Morin : « 2050, c’est loin, et pas si loin. Il va falloir prendre dès maintenant les bonnes pratiques à mettre en place car le réchauffement climatique est bien là ».
Guillaume Hédouin, responsable du pôle tourisme du Parc, renchérissait : « Toutes ces réflexions et ces imaginaires ont été mis en parallèle avec ce que prévoit la science. À commencer par la vie dans un monde 2.0 sur pilotis, en éco-construction, ou un monde végétal ». (in Ouest-France, édition de Carentan – 22 octobre 2019).

Le 12 janvier 2020 – et ce n’est pas si loin – Ingrid Godard, dans son article « Les marais se découvrent à la Maison du Parc », énumérait les nombreux atouts du Parc :

  • En hiver, la « Blanchie » et les oiseaux
  • Au printemps, la nidification des cigognes et des passereaux des roseaux
  • En été, les travaux des champs, la riche vie des mares
  • En automne, le retour des migrateurs nordiques.

La création de sentiers de découvertes ornithologiques fait du Parc un paradis pour la Ligue de Protection des Oiseaux. (in Ouest-France, 12 janvier 2020)

4.- Pour le P.N.R. du Perche
Jean-Michel Bouvier, président du Parc, fait connaître les ambitions de cette institution, le 25 octobre 2017, en ces termes, dans le journal Le Perche : 

« La Région souhaite orienter l’action des Parcs sur des thématiques-clés du développement durable : préservation de la biodiversité et restauration de la Trame Verte et Bleue ; développement de filières courtes locales, durables s’appuyant sur les ressources et les savoir-faire locaux ; l’attractivité touristique et résidentielle ; la transition énergétique. Nous avons donc développé nos projets autour de ces priorités ».

Il ajoutait – élément nouveau - :

« Si l’on prend la Trame Noire, on voit bien que la lutte contre la pollution lumineuse permet de travailler pour la préservation des espèces nocturnes, sur la solarité énergétique et en faveur du tourisme, avec, par exemple, la labellisation de villages au ciel nocturne de grande qualité, propice à l’observation des étoiles ».

Là, encore, dans ce P.N.R., on trouve une liste d’objectifs et de réalisations typiques d’une sorte de mieux-vivre dans un territoire défini :
Structurer les filières locales

  • Création d’ateliers de transformation du petit agro-alimentaire
  • Mise en place d’une charte forestière à partir de laquelle une filière « Bois du Perche » est estampillée « Valeurs Parc »
  • Sensibilisation des agriculteurs à des pratiques vertueuses et innovantes.
  • Développement de l’attractivité touristique et préservation des races locales (cheval percheron, abeille noire).

Ce n’est pas un hasard si le Perche est actuellement l’une des zones les plus recherchées des Parisiens (résidences secondaires, télétravail, tourisme de week-end).

Ce tour d’horizon du phénomène Parcs en Normandie nous permet d’affirmer que les collectivités locales, la Région au premier chef, y développent une vraie politique d’écologie positive et enracinée. Nous sommes loin de l’écologisme dogmatique. Nous sommes dans le concret. C’est une accumulation de petits pas vers une appropriation retrouvée des territoires par les populations résidentes et la reconnaissance de valeurs souvent immémoriales qui contribuent au mieux vivre des habitants. Si le passé est, non seulement revalorisé, mais mieux connu, la pratique des Parcs est tournée vers l’avenir car on y conduit des expérimentations dans les domaines du climat, du bâti, des échanges directs, de la sauvegarde de la faune sauvage et domestique, de la flore et des paysages. Au moment où, à cause de la crise virale, les Français ont, pour beaucoup, redécouvert une ruralité (dont ils étaient issus le plus souvent), où de nouvelles formes de travail incitent les salariés à pratiquer dans les villages et les petites villes où ils résident, le co-working et le travail distancié, l’expérience des Parcs devient un atout indépassable. Face aux concentrations urbaines qui génèrent des problèmes insolubles, les Parcs, parce qu’ils n’ont pas une vision négative de la vie économique, proposent une alternative fondée sur la notion de bien-être. L’exemple du P.N.R. des Boucles de la Seine normande est tout à fait significatif : situé entre les agglomérations de Rouen et du Havre, traversé par une vallée de la Seine, belle certes, mais industrielle, ce Parc est une sorte de poumon vert dans l’Axe Seine. Il concilie des contraires et parvient à harmoniser l’ensemble. Imagine-t-on un seul instant cette zone fragile et vibrante sans l’action temporisatrice et cordonnée du Parc ?
De même, que serait la zone des marais du Cotentin et du Bessin sans l’action régulatrice et raisonnée du Parc ?

Nos trois organisations (le Mouvement Normand, l’O.N.D.E. et l’O.D.I.N.) sont TRÈS favorables à l’institution des Parcs naturels régionaux. Cela veut dire que nous refusons les réticences des uns (certains milieux agricoles critiquent à tort les exigences des Parcs) et les timidités des autres (les collectivités locales hésitent à s’engager financièrement en faveur des Parcs dont les budgets sont importants, c’est vrai, mais qui échappent en partie à la pratique du saupoudrage des politiques environnementales sans cohérence).
Cette cohérence des P.N.R. qui rassemble populations et élus, associations et organismes, tous les ordres de métiers, scientifiques et praticiens, reconstitue idéalement une société insérée dans un territoire.
Dernier point, et non des moindres : pour les Parcs naturels régionaux à cheval sur deux Régions (en l’occurrence Normandie – Maine, Perche), il est fait la démonstration du bien-fondé des coopérations interrégionales. La Normandie trouve, là, un intérêt à œuvrer avec les Pays de la Loire et la Région Centre. Question : quid de ce type de coopération interrégionale avec les autres Régions voisines ?
C’est ce que nous allons aborder maintenant, mais, au préalable, nous souhaiterions réfléchir à l’extension des Parcs actuels à l’intérieur même de la Normandie.


POUR UNE EXTENSION DES ACTUELS PARCS NATURELS RÉGIONAUX

Le sujet n’est pas tabou. D’ailleurs des Parcs ont vu leurs limites évoluer. Le P.N.R. des Boucles de la Seine normande, qui comprend aujourd’hui 77 communes, n’en comptait que 35 en 1974 alors qu’il s’appelait Parc de Brotonne.
Nous pensons, toujours avec cet exemple du P.N.R. des Boucles de la Seine normande, qu’il y aurait avantage et cohérence à adjoindre les communes des cantons de Brionne et de Montfort-su-Risle à l’ensemble. Cela signifierait l’apport de la Forêt domaniale de Montfort dans un ensemble forestier déjà considérable, une prise en compte de l’ensemble de la basse vallée de la Risle (le Parc ayant déjà regard sur la Risle maritime), une conjugaison des abbayes emblématiques ajoutant le Bec-Hellouin à Fontenelle Saint-Wandrille et leurs consœurs de la vallée de la Seine.
Toutes les communes concernées par les marais du Bessin et du Cotentin se retrouvent-elles dans le Parc des Marais ?
Toutes les communes du Bocage ornais et manchois s’intègrent-elles dans le Parc Normandie-Maine ? (en l’occurrence, nous n’évoquons pas les extensions possibles en Sarthe et en Mayenne…).

POUR LA CREATION DE NOUVEAUX PARCS NATURELS RÉGIONAUX

Il ne s’agit pas d’une élucubration, mais d’une hypothèse de travail qui a reçu un début de préparation. Nous avons donc la conviction que, tôt ou tard, il y aura concrétisation.
Deux projets de nouveaux P.N.R. sont en chantier : le Parc naturel régional du Vexin normand et le Parc naturel régional du Pays de Bray. Cela concerne deux départements normands : l’Eure et la Seine-Maritime. Pour le P.N.R. du Pays de Bray, puisque celui-ci se prolonge dans le Beauvaisis, cela concerne la Région normande et celle des Hauts de France.
Examinons successivement ces deux projets.

1.- Le projet du P.N.R. du Pays de Bray
Dans un article du 6 août 2017, le journal Liberté-Dimanche faisait l’état de la question sous le titre « La course au Parc naturel ».  « Non !, disait-il, ce n’est pas un serpent de mer ! ». Et de donner la parole au président du Pôle d’équilibre territorial et rural du Pays de Bray (P.E.T.R.), Xavier Lefrançois : « Ce n’est pas un caprice. Il y a cinquante ans, on aurait pu l’avoir. On a préféré la vallée de la Seine ». Et de préciser : « À l’époque, c’est vrai que c’était le fin fond du trou ici. Mais, désormais, cet éloignement est un atout, avec un caractère d’authenticité (…) Nous aider à faire le poids pour vendre le Pays de Bray. Je me donne jusqu’en 2021 pour réussir (…) Des études touristiques ont été lancées, dont nous attendons les résultats bientôt. Mais l’époque est propice, il y a un bel élan favorable à l’environnement, aux paysages, à la qualité des produits ».
Le projet concernerait 55 communes en Normandie et 22 en Picardie. Il s’y trouve 4 sites Natura 2000, la plus belle hétraie, le croisement des autoroutes A 28 et A 29, la proximité de l’A 16. Géologiquement, la « boutonnière » du Bray est exceptionnelle. Forges-les-Eaux fut une station thermale, l’élevage est réputé et le Pays de Bray fut au XIXe siècle une sorte de ferme de Paris.
Où sont les obstacles et les réticences ?

Le Président de la Normandie, Hervé Morin, alors, était réticent : un P.N.R. coûte cher aux finances de la Région. Hubert Dejean de la Batie, vice-président de la Région chargé des questions environnementales, bottait en touche : « Un Parc, c’est 1 million d’euros /an en charges de fonctionnement ». À l’inverse, son homologue des Hauts de France se disait « intéressée ».
Les agriculteurs, il faut le dire, se montraient peu favorables.
Finalement, l’obstacle principal était d’ordre administratif : il y a redondance et confusion de missions entre l’éventuel Parc et le Pôle d’équilibre territorial et rural du Pays de Bray… Ce qui faisait dire à un observateur averti, Michel Lerond, « Le P.N.R. existe, c’est le P.E.T.R. du Pays de Bray ! »

Tout est-il dit ?
Le Mouvement Normand, l’O.N.D.E. et l’O.D.I.N. estimons que non ! La situation de 2017 n’est plus celle de 2021. Le besoin de Parcs naturels régionaux est plus intense. À cause de l’évolution du climat. À cause de la crise. À cause de la nécessité enfin admise d’une revalorisation des espaces ruraux. À cause du désir d’un plus grand nombre de citadins de vivre dans un autre contexte que les concentrations urbaines.
Le P.N.R. du Pays de Bray devient une nécessité, presque une « ardente obligation » d’aménagement du territoire.

2.- Le projet de P.N.R. du Vexin Normand
Il y a comme une sorte de hiatus dans le fait qu’il existe un P.N.R. du Vexin français cornaqué par la Région Ile-de-France, et que, du côté normand, notre Vexin soit un territoire inerte. Hiatus, mais aussi erreur historique : le Vexin, en son ensemble, est une entité bien identifiée depuis… l’époque gauloise ! Et faut-il rappeler que la Province ecclésiastique de Rouen comprenait jadis l’archidiaconé de Pontoise et que la Normandie, qui en fut la transcription politique, a longtemps revendiqué cette partie du Vexin. Au reste, la vallée de l’Epte, qui sépare la Normandie de l’Ile-de-France, particulièrement belle et méconnue de trop de Normands, constitue plus un trait d’union qu’une solution de continuité : or, elle est partagée selon ses rives !
Paris-Normandie, édition de l’Eure, du 24 avril 2020, consacre une page sous le titre « Pour un Parc du Vexin », évoquant d’emblée, le programme du Maire de Gisors, Alexandre Rassaert :

« Nous lancerons ce projet pour valoriser et protéger notre patrimoine naturel. Celui-ci inclurait la volonté de privilégier le développement de l’hydraulique (remise en fonction des anciens moulins), du phovoltaïque et de la méthanisation en alternative de l’éolien. »

Alexandre Rassaert, on le voit, considère la création d’un P.N.R. comme un moyen de défense contre le n’importe quoi du mitage urbain, de l’explosion inconsidérée des parcs éoliens destructeurs de paysages, et pour rechercher un équilibre entre développement et préservation de l’environnement.
L’idée d’un Parc du Vexin normand n’est pas nouvelle. En 1995, Marc Giraud, président du P.N.R. du Vexin français s’était opposé à l’idée de création d’un Parc du Vexin franco-normand par extension du P.N.R. du Vexin français. Il avait été suivi en cela par les élus de la Région Ile-de-France. L’un des arguments de ce M. Giraud prête d’ailleurs à sourire : « Sur le plan du bâti, il y a des colombages normands qu’on n’a pas ici ! ».
Depuis le principe d’un P.N.R. unique franco-normand est abandonnée : on en revient donc à l’idée du P.N.R. du Vexin normand. Disons-le tout net : cela n’a pas soulevé l’enthousiasme des dirigeants de l’ex-Région haute-Normandie, pas plus que celui des responsables de l’actuelle Région Normandie. La raison, évidemment, était – en 2020, il faut le préciser – essentiellement budgétaire.
Et puis, là encore, il y a une sorte de confusion/redondance et concurrence entre l’éventualité d’un P.N.R. et l’existence d’un P.E.T.R.. Le Pays du Vexin normand, qui regroupe deux communautés de communes (C.D.C.), Gisors-Epte-Lévrière et les Andelys et quatre cantons, Lyons-la-Forêt, Epte-Vexin-Seine, Andelle et Etrépagny, a renoncé à l’idée de Parc du Vexin. Thierry Plouvier, ex-président du Pays, s’en explique : « Ce n’est pas quelque chose de simple à mettre en route avec les contraintes environnementales ». Insistons : nous sommes en 2020 et on n’a pas encore ressenti les conséquences de la crise virale, ni la pression de l’opinion pour une meilleure prise en compte de ces fameuses contraintes environnementales…
En tout cas, cela ne décourage pas le Maire de Gisors, « capitale du Vexin ». Il veut être à l’initiative de la relance pour la création du P.N.R. du Vexin. Il ne se dissimule pas les difficultés, mais, avec lucidité, il énumère les ingrédients pour réussir l’opération :

« Pour les ingrédients, il faut qu’il y ait des élus locaux porteurs, des conseillers départementaux et, au moins, un vice-président de la Région qui acceptent. Il faut aussi trouver quelques porteurs dans le monde associatif. Et avoir des gens du monde de l’histoire et de la culture qui aient une idée de l’âme du territoire ».

Alexandre Rassaert revient ensuite sur les raisons fondamentales de la création d’un P.N.R. :

« Créer un Parc naturel régional permettrait de nombreux garde-fous à des dérives liées au développement urbain inéluctable de nos territoires au vu de l’évolution démographique de la région parisienne.  Nous devons développer notre attractivité, certes, mais pas au détriment de notre identité et de nos paysages. »

Tout est dit. Nous ne pouvons que souscrire à ces pétitions de principe.


POUR CONCLURE

Pour conclure, provisoirement, le Mouvement Normand, l’O.N.D.E. et l’O.D.I.N. expriment la conviction que l’existence des Parcs naturels régionaux est la meilleure réponse aux maux qui assaillent ces portions de territoire, rurales mais pas que…, où se combinent le plus harmonieusement activités traditionnelles (qui ont besoin d’être protégées et mieux valorisées) et les activités innovantes (industrielles et tertiaires), où, sans méconnaître le passé, mieux mis en évidence (la tâche des historiens et des érudits locaux est fondamentale), on prépare l’avenir. Cet avenir passe obligatoirement par la prise de conscience des évolutions climatiques, la préservation des ressources naturelles, le respect de la biodiversité, la recherche d’un mode de vie moins stressant, la défense de l’environnement, la lutte contre les pollutions. Les P.N.R., parce que l’on y globalise tous ces éléments sont la réponse la plus adéquate à l’inquiétude actuelle et, peut-être, parmi les lieux où les nouvelles conditions de travail (télétravail par exemple) et les nouvelles conditions de vie peuvent s’épanouir, créant ainsi de nouveaux équilibres économiques et sociaux.
L’État, à notre avis, devrait contribuer à plus de 10 % au financement des Parcs naturels régionaux : nous en appelons aux Parlementaires pour qu’ils relaient cette nouvelle orientation de la politique écologique gouvernementale.
La Région, qui doit en même temps se préoccuper des zones littorales – c’est un autre dossier tout aussi important – doit prioriser la formule des Parcs naturels régionaux et ne pas craindre de s’y investir financièrement. Ce faisant, elle privilégiera le long terme et répondra en grande partie à la désespérance d’une ruralité se sentant abandonnée et d’une périphérie urbaine craignant les développements anarchiques.
Nous suggérons, in fine, qu’une grande campagne de communication, à destination d’abord des Normands eux-mêmes, fasse connaître au plus grand nombre ces espaces protégés et reconquis depuis cinquante ans : les Normands et les autres découvriront les véritables trésors de la Normandie profonde.


DIDIER PATTE
Porte – parole et ancien Président du Mouvement Normand
Administrateur de l’O.N.D.E. et de l’O.D.I.N.


NOTA BENE

Pour constituer ce dossier, nous avons utilisé les documents fournis par trois associations :

  • Le Mouvement Normand, spécialisé dans les questions institutionnelles et d’aménagement du territoire (adresse : B.P. n° 6 – 27 290 – Pont-Authou)
  • L’Organisation Normande de Défense de l’Environnement (O.N.D.E.) qui s’inspire des idées d’un écologisme responsable pour une écologie positive et qu’elle défend dans son bulletin FRÉQUENCES NORMANDES (adresse : 1446, rue de la Maison Forestière, 27 290 – Ecaquelon)
  • L’Office de Documentation et d’Information de Normandie (O.D.I.N.) qui, depuis des décennies, collecte et classifie les articles de presse concernant les problèmes normands, dans la presse normande et la presse nationale. En outre, avec sa Revue CULTURE NORMANDE, l’O.D.I.N. cherche à promouvoir la culture enracinée. (adresse : 87, rue de la République – 76 940 Arelaune-en-Seine).
  • Nous remercions tout particulièrement les journalistes, dont nous n’avons pas omis de mentionner les noms, et dont les articles ont servi de base documentaire à la rédaction de ce dossier.
  • Enfin, nous ferons destinataires toutes les personnalités dont nous avons relevé les déclarations (ainsi que de nombreux responsables normands) en souhaitant qu’ils ouvrent le débat avec nous. Ce dossier aura une suite et, bien entendu, nous tiendrons compte des observations et des suggestions qui nous seront faites.

La Rédaction